𝐌𝐨𝐦𝐞𝐧𝐭𝐬 𝐝𝐞 𝐯𝐢𝐞 : 𝐂𝐞 𝐦𝐚𝐭𝐢𝐧 𝐚𝐮 𝐒𝐨𝐥𝐞𝐢𝐥 𝐍𝐨𝐢𝐫.

Il était assis là, droit comme il pouvait encore l’être. Une doudoune, un souffle un peu court, les gestes comptés. Sur ses genoux, un petit chien. Léger. Silencieux. Les yeux tournés vers la porte, comme si quelqu’un devait entrer.

𝐂𝐆𝐑, 𝐥’𝐞𝐦𝐩𝐢𝐫𝐞 𝐪𝐮𝐢 𝐧’𝐚𝐢𝐦𝐞 𝐩𝐚𝐬 𝐥𝐚 𝐥𝐮𝐦𝐢𝐞̀𝐫𝐞.

Je croyais que la culture était un bien commun. Une respiration. Je découvre qu’elle est surtout un territoire. À défendre. À verrouiller.

𝐀̀ 𝐁𝐞́𝐳𝐢𝐞𝐫𝐬, 𝐝𝐞𝐬 𝐯𝐢𝐠𝐧𝐞𝐫𝐨𝐧𝐬 𝐜𝐨𝐧𝐭𝐫𝐞 𝐥𝐞 𝐫𝐞́𝐞𝐥 !

Cinq mille viticulteurs descendent sur Béziers aujourd’hui. Ils veulent sauver la viticulture. Ils réclament des primes pour arracher, des subventions pour distiller, des aides à la reconversion, des reports de dettes, des ristournes sur l’électricité, des compensations sur le gazole.

La liste est longue. Trop longue.

Moments de vie : N’oubliez pas !

J’aime ce nom. Rue du Bois Roland. Il sonne juste.

Je la prends souvent. Pour marcher. Pour respirer.

Des maisons basses. Des murs pâles. Des jardins serrés contre la rue.

Devant l’une, les belles de nuit débordent. Fleurs, graines.

Petites perles noires tombées sur le trottoir.

J’en ramasse. J’en sèmerai autour de ma cabane.

« Pardon Monsieur ! »

Voix claire. Une femme âgée dans un fauteuil roulant. Un homme la pousse.

Le bras droit immobile. Les yeux, vivants.

Elle me sourit. On s’excuse ensemble.

Plus loin, une maison bleue.

Le portail, les persiennes, les fleurs. Tout bleu.

Je touche les branches. Fines. Fraîches.

« Pardon Monsieur ! »

Encore elle. Même sourire.

— Je cherchais des graines.

— Il n’en fait pas, dit-elle. Mais je peux vous faire des boutures.

Un pot. Oui.

Elle ouvre son portail.

— N’oubliez pas.

Je promets. Le vent se lève.

Les fleurs bougent. Le bleu tremble un peu.

Et je me dis qu’il suffit d’un geste offert

pour que la vie reparte.

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