Ce paragraphe extrait des Essais de Montaigne sur le bon usage des citations, que j’adresse à l’ami Gilles qui, un soir, su m’écouter:
« Qu’on regarde en ce que j’emprunte si j’ai su choisirquelque chose qui rehausse ou appuie convenablement le reste,qui lui, est bien de moi. Car je fais dire aux autres, non pasd’abord, mais ensuite, ce que je ne parviens pas à dire aussi bien,à cause de la faiblesse de mon langage, ou de mon esprit. Je necompte pas mes emprunts : je les soupèse. Et si j’avais voulu les faire valoir par leur nombre, j’en aurais mis deux fois plus. Ilsviennent tous, ou fort peu s’en faut, de noms si fameux et si anciensqu’ils me semblent se nommer d’eux-mêmes, sans avoir besoinde moi. Dans les raisonnements, comparaisons et arguments,si j’en transplante dans mon propre champ, pour les mélangeraux miens, je cache parfois volontairement le nom de leur auteur,pour freiner la témérité de ces critiques hâtives, que l’on profère à propos de toutes sortes d’écrits, et notamment récents, œuvresd’hommes encore vivants et écrites dans la langue « vulgaire »,celle d’aujourd’hui, ce qui permet à tout un chacun d’en parler,et qui semble donner à penser que la conception et le desseinde l’œuvre elle-même sont, eux aussi, vulgaires. Je veux que cesgens-là croyant me donner une pichenette sur le nez la donnent en fait sur celui… de Plutarque ! Et qu’ils se ridiculisent à injurierSénèque à travers moi. Il me faut bien dissimuler ma faiblessesous ces grandes autorités. »
« Ne sois pas trop juste, ne pratique pas trop la sagesse : pourquoi te rendre ridicule? » (L’Ecclésiaste)
Mes images:
« Dandy », « nihiliste petit-bourgeois », « frimeur dilettante », Frédéric Schiffter se pâme de ses vertus, que tant de philosophes, Zarathoustra du bocage ou bluffeurs d’éthiques, honnissent. Déjà, étudiant, il préférait Manchette à Lévinas. Pourtant, « l’essayiste le moins lu de France » signe aujourd’hui son dixième livre, un décalogue inspiré par dix aphorismes cueillis parmi son panthéon, dans lequel Freud allonge Proust tandis que Pessoa flirte avec l’Ecclésiaste.
On ouvre un carnet, et on tombe sur ces quelques phrases notées au fil de lectures…
Kundera: « Nous traversons le présent les yeux bandés. Tout au plus pouvons-nous pressentir et deviner ce que nous sommes en train de vivre. Plus tard seulement, quand est dénoué le bandeau et que nous examinons le passé, nous nous rendons compte de ce que nous avons vécu et nous en comprenons le sens. »(Risibles amours, trad. François Kérel, p.13, Folio n°1702)
« Par une certaine partie de nous-mêmes, nous vivons tous au-delà du temps. Peut-être ne prenons-nous conscience de notre âge qu’en certains moments exceptionnels, étant la plupart du temps des sans-âges. »(L’immortalité, trad. Eva Bloch, p.14, Folio n°2447)
« Si l’on était responsable que des choses dont on a conscience, les imbéciles seraient d’avance absous de toute faute. […] l’homme est tenu de savoir. L’homme est responsable de son ignorance. L’ignorance est une faute. »(Risibles amours, trad. François Kérel, p.127, Folio n°1702)
Borges: « Ce qui importe ce n’est pas de lire mais de relire. »(Le livre de Sable, trad. Françoise-Marie Rosset, p.103, (Éd.Gallimard)
Sur le style, en littérature, mais pas seulement, cette page lue dans « La culture des idées » de Rémy de Gourmont (1858-1915). Ce matin, juste après mon café. Corsé!
Mes lectures:
«Déprécier l’écriture, c’est une précaution que prennent de temps à autre les écrivains nuls; ils la croient bonne; elle est le signe de leur médiocrité et l’aveu d’une tristesse. Ce n’est pas sans dépit que l’impuissant renonce à la jolie femme aux yeux trop limpides; il doit y avoir de l’amertume dans le dédain public d’un homme qui confesse l’ignorance première de son métier ou l’absence du don sans lequel l’exercice de ce métier est une imposture. Cependant quelques-uns de ces pauvres se glorifient de leur indigence; ils déclarent que leurs idées sont assez belles pour se passer de vêtement, que les images les plus neuves et les plus riches ne sont que des voiles de vanité jetés sur le néant de la pensée, que ce qui importe, après tout, c’est le fond et non la forme, l’esprit et non la lettre, la chose et non le mot, et ils peuvent parler ainsi très longtemps, car ils possèdent une meute de clichés nombreuse et docile, mais pas méchante. Il faut plaindre les premiers et mépriser les seconds et ne leur rien répondre, sinon ceci: qu’il y a deux littératures et qu’ils font partie de l’autre. Deux littératures: c’est une manière de dire provisoire et de prudence, afin que la meute nous oublie, ayant sa part du paysage et la vue du jardin où elle n’entrera pas. S’il n’y avait pas deux littératures et deux provinces, il faudrait égorger immédiatement presque tous les écrivains français; cela serait une besogne bien malpropre et de laquelle, pour ma part, je rougirais de me mêler. Laissons donc; la frontière est tracée; il y a deux sortes d’écrivains: les écrivains qui écrivent et les écrivains qui n’écrivent pas, — comme il y a les chanteurs aphones et les chanteurs qui ont de la voix.»
Elle s’appelle Dolores. Nous l’appelions : Lola ! Elle ne répond plus à l’un comme à l’autre de ses deux prénoms. Lola lui avait été donnée par sa famille. La mienne ! Elle était ma tante, celle par qui les liens étaient maintenus, serrés, avec les cousins et cousines restés en Espagne. À Cox !
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