Contre-Regards

par Michel SANTO

Plus d’Europe et mieux d’Etat.

 

 

 

On sait qu’en japonais l’idéogramme : « crise » est composé de deux signes. Le premier signifie danger et le second opportunité (merveilleuse dialectique asiatique !…) Celle qui affecte l’Europe, partie du berceau de notre culture philosophique, n’échappera pas cette alternative. Soit régresser vers des formes de nationalismes économiques et sociaux en promouvant la sortie de la monnaie commune. Soit mettre en place une véritable coordination budgétaire et fiscale au niveau communautaire.

On l’a assez dit ailleurs dans la presse spécialisée pour que je ne m’attarde pas sur ce point, mais croire qu’il est possible d’avoir une monnaie commune avec des gestions budgétaires fondamentalement divergentes c’est en réalité vouloir transférer aux états vertueux (comme l’Allemagne) le laxisme et les facilités de ceux qui prétendent l’être (comme la France). Et la situation de la Grèce, de l’Espagne et du Portugal est le révélateur de cette contradiction devenue insoutenable.

Ce qu’attendent les détenteurs de capitaux (qui, après tout, font leur métier de gérer au mieux l’épargne accumulée par le privé et le public en Asie, Amérique du Nord, Pays du Golfe et Europe…) c’est plus que des mesures d’urgence prises pour pallier les défauts de paiement à court terme des trois maillons faibles européens. Ils veulent surtout des garanties sérieuses sur la longue durée et ces garanties passent nécessairement par des transferts de souveraineté des Etats au niveau européen. Une gouvernance économique, toujours repoussée mais à présent, et dans la douleur, à l’ordre du jour. Et qui, aussitôt avancée par le Président de la Commission de Bruxelles à travers une proposition de contrôle des politiques budgétaires des Etats lors de leur élaboration, de leur mise en œuvre et de leur réalisation, accompagnée de sanctions véritables pour tous ceux qui ne respecteraient pas les critères communs définis en commun ( taux de déficit, d’endettement…), est critiquée, voire combattue.

Une proposition qui pourtant n’est que la traduction concrète d’un gouvernement économique de la zone euro que la France, depuis des années, ses gouvernements successifs certes, mais aussi les contempteurs d’une « Europe financière », appelle de leurs vœux. Un véritable basculement européen donc. Une « révolution froide » dont malheureusement nos élites gouvernementales, qu’elles soient au pouvoir ou qu’elles espèrent le conquérir, ne parlent guère. Pour l’expliquer, la mettre en perspective afin que chaque citoyen donne du sens à l’effort demandé aujourd’hui, et encore demain pendant des années.

C’est plus d’Europe en effet dont nous avons besoin pour sortir de la crise. Plus d’Europe et plus de rigueur dans les politiques communes. Le chemin sera long ! Il serait temps que les plus hautes autorités de l’Etat pourtant d’habitude si bavardes se décident à le dire aux français.

L’Ascension de Peyrepertuse…

 

 

Dans le Midi Libre d’aujourd’hui, ça commence comme un vulgaire dépliant touristique : «  Il est si beau, le petit sentier qui sinue tantôt sous les arbres, tantôt entre les buissons, jusqu’aux vieilles pierres du château de Peyrepertuse, offrant une vue inoubliable au visiteur du site cathare. » Mais, car il y a un mais : « … Impossible d’en profiter quand on doit se déplacer en fauteuil roulant, voire avec de simples rhumatismes douloureux. » Qui fit naître dans l’esprit audacieux de l’édile du lieu le projet : « … d’un ascenseur direct entre le parking et le château. » Un aménagement qu’il devrait compléter par la création d’un métro aérien afin de le relier à l’ancestrale Cité de Carcassonne et à l’ensemble monumental de Narbonne . En ces terres cathares où souffle désormais l’Absurde, nos élus manquent cruellement d’ambition…

Le maître et ses disciples.

 

Dans ce roman, Paul Bourget met en cause les responsabilités des maîtres à penser de l’époque sur leurs élèves . Sa clef: montrer que tout savoir abstrait, toute idée est mauvaise pour des hommes privés de liberté de penser. Une mise en cause percutante de la responsabilité des élites quant aux effets de leurs  » discours  » sur ceux qui leur accordent leur confiance. Un texte, comme tous les classiques, qui nous renseigne sur notre époque. A lire, ou à relire, donc, plutôt que d’écouter un Guillon, par exemple… 

C’était en 2009 au Bac philo!

Dissertant sur le progrès technique, nos jeunes gens écrivaient , en 2009, entre autres perles, ceci:

 » Ceux qui n’acceptent pas le progrès technique sont obligés de s’exclure de la société, de vivre dans la jungle, dans la forêt.

Cette individualisation aura des répercussions sur le quotidien de la société, l’absentéisme aux élections en est un exemple.

Ainsi les ménages travaillent de moins en moins, de plus l’invention de la télévision, de l’ordinateur n’arrange pas le tout.

Par exemple si l’homme n’arrive pas à s’orienter avec une boussole il en conclura qu’il devra pour le futur se munir d’un GPS afin de ne pas reproduire la même erreur, de plus son point de vue sur l’orientation sera positive.

Le développement technique a aussi amélioré le confort en ce qui concerne les commodités. Nous ne sommes plus obligés de s’en occuper et de déposer dans le jardin ou ailleurs comme dans le temps, puisque maintenant tout part dans des stations faites pour. « 

On redoute de les lire demain sur le même sujet… Car, à «  cette question “le développement technique transforme-t-il les hommes ?” la réponse à extraire n’est donc pas une évidence. « 

Pauvre pensée d’Europe.

La situation de crise que vit l’Europe est dans l’esprit des Français pendant que les chefs d’Etat de l’Union sont réunis aujourd’hui pour s’accorder sur une réponse institutionnelle et financière commune à la méfiance accrue des marchés quant à la capacité de certains pays à honorer leurs dettes. C’est dans ce contexte que le seul parti de gouvernement capable de proposer une offre politique de substitution sort un projet préfigurant son programme pour la prochaine présidentielle. Que dit-il ? En voici une courte analyse de Grunberg dans Telos : « Ce texte nous dit deux choses contradictoires. D’une part, il appelle à relancer l’action de l’Union européenne (ce qui est juste et nécessaire) et à instaurer un gouvernement économique (ce qui est, au moins dans la direction, une idée importante). Mais d’autre part, tout en reconnaissant que les gouvernements européens et les pouvoirs européens sont de plus en plus orientés à droite, il propose des mesures, qu’il s’agisse de la BCE, de la politique industrielle, de la gestion des finances publiques, des politiques concernant les entreprises et la concurrence, que nos partenaires les plus puissants, tels l’Allemagne, rejetteront à l’évidence. Ce volontarisme européen, comme il se définit lui-même, est-il alors de quelque utilité ?

La politique européenne avance par compromis : comment nous situer face à l’Allemagne, quels compromis tenter d’obtenir d’elle ? Ces questions ne sont pas posées. S’agit-il vraiment dans ces conditions d’une politique de relance de la construction européenne ? Une fois encore, les socialistes entendent imposer à l’Europe leur propre modèle de l’Europe. Pourquoi cette énième tentative aurait-t-elle plus de succès que les précédentes ? »

On imagine la tête de DSK lisant ce texte. Qui l’amènerait, s’il était candidat et choisit lors de primaires, comme Ségolène en son temps sur d’autres sujets, à le mettre au placard…