Contre-Regards

par Michel SANTO

La leçon du  » tournant de mars 1983 « 

 

 

 

La situation d’un certain nombre de pays européens (La Grèce étant le modèle paroxistique de ce qui pourrait advenir à l’ Espagne ou au Portugal…), nous remet en mémoire le débat politique engagé au plus niveau de l’Etat français en 1983, dans une situation économique et financière où le franc avait subi deux dévaluations, l’inflation était autour de 8% l’an et le déficit budgétaire, pour 1982, de 150 milliards de francs. Alan Argoul nous le réactualise dans une de ces notes, toujours bien informée, dont je vous livre deux extraits.

« Dès lors, il faut choisir entre dévaluation ou flottement. Le flottement signifie la sortie du serpent monétaire européen (SME) ancêtre de l’euro. Le franc se trouvera immédiatement dévalué par les marchés de 20% pour rééquilibrer le solde des échanges (exportations contre importations), le déficit extérieur croîtra de 2 milliards de francs par mois, nécessitant un emprunt international massif qui ne pourra se faire dans des conditions honorables sans plan de rigueur. Et qui pourrait bien aboutir à la tutelle du FMI, les autres pays ne désirant pas prêter sans discipline. La France, par le pétrole, par sa consommation, par ses exportations, dépend de l’extérieur. Le temps du splendide isolement d’une population majoritairement rurale est révolu. Selon Attali, trois programmes économiques socialistes se trouvaient alors en concurrence : celui « de bon sens » du Premier ministre Pierre Mauroy et de Jacques Delors, celui, « saint-simonien productiviste » (selon Lacouture) des « visiteurs du soir » (Jean Riboud, JJSS) encouragés par Laurent Fabius, Gaston Deferre et Pierre Bérégovoy – un « national-protectionnisme » (Lacouture), enfin celui des « experts de l’Elysée » dans lesquels Attali se situe, « dans la ligne du Premier ministre mais en plus socialement compréhensible ». »  (Voir aussi cet aricle de l’Expansion en lien)

Au final, c’est la ligne Delors qui finira par s’imposer  (J. Lacouture précisant qu’elle était déjà celle de F. Mitterand, ce que François Stasse (1), qui fut son conseiller économique, conteste dans le lien précédent) :

« dès le 24 mars, le plan de rigueur de Delors est adopté en Conseil des ministres : baisse du déficit budgétaire, hausse des taxes sur la vignette auto, l’alcool et le tabac, hausse du forfait hospitalier et de l’essence, hausse des tarifs EDF, GDF et SNCF, emprunt forcé, baisse des stocks pétroliers, contrôle des changes et instauration d’un carnet de change aux devises limitées à 2000 francs pour chaque touriste français se rendant à l’étranger… Ces mesures sont de l’ordre de 2% du PNB selon Attali, « on reprend ce qu’on avait donné en juin 1981 » ; » Afficher l'image en taille réelle

Un retour sur le passé qui éclaire le sérieux et la vérité de certaines des propositions défendues par une fraction de la gauche (Hamon-Mélenchon) et de la droite (Dupont-Aignan, Le Pen), aujourd’hui, en France. Et qui illustre, aussi, la démagogie de certaines postures chez les autres : retraites, montant et niveau des dépenses publiques etc…

(1) Auteur, par ailleurs, d’un remarquable article :  » Pour les discriminations positives «   dans la revue Pouvoirs.

Le boeuf sur la langue…

 

 

 

La langue est un organe mou situé à l’intérieur de la bouche. Elle peut être chargée, blanche, bien affilée. Mais aussi râpeuse, braisée, fumée ou extensible. Il arrive parfois, selon son humeur ou celle de son interlocuteur, qu’on l’avale, la perde, l’altère ou la déconstruise. Qu’elle s’éteigne, se déconstruise, disparaisse. Ou se transforme. Pour n’être plus des hommes, mais de vipère, de sorcière, de serpent, de mouton ou de porc. Mauvaise ou méchante, qu’on la tourne, la coupe, la morde, la tire, rien ni personne ne saurait la retenir. Il fut un temps, hélas perdu, à Rome, dans l’Antiquité, où on achetait le silence des délateurs, des indicateurs en tout genre, en les payant à l’aide de pièces d’or frappées à l’effigie d’un bœuf, qui, moralement, pesait assez lourd sur leur langue pour les rendre muets. Quel silence et quelle paix si tous nos professionnels de la langue pouvaient avoir un bœuf sur la leur…

 

PS : Recette de la langue de bœuf à l’aïoli :

Laisser tremper la langue une nuit dans un grand volume d’eau froide. Verser 2 l d’eau dans une cocotte. Ajouter le verre de vinaigre, bouquet garni, sel, carottes, oignons coupés en rondelles. Porter à ébullition et laisser cuire 1 h à feu doux. Laisser refroidir. Egoutter la langue et la plonger dans une grande casserole d’eau à ébullition. Laisser cuire 10 mn, égoutter et retirer la peau.

 Remettre la langue pelée dans le court-bouillon et porter à ébullition, couvrir et laisser cuire (3 h) à feu doux. Aïoli : mélanger dans un bol l’ail écrasé et le jaune d’œuf, puis verser l’huile peu à peu. Saler et poivrer. Egoutter la langue, la couper en cubes et la servir tiède avec l’aïoli.

 

La burqua verte de Mamère.

 

 

Mamère, Noël de son prénom, est un « progressiste ». Un Vert qui voit rouge à propos du futur projet de loi d’interdiction du port de la burqua dans l’ensemble de l’espace public.  Selon lui, « tout cela vise à stigmatiser la deuxième religion de France et à faire croire que lorsqu’on est musulman, on n’est pas compatible avec la démocratie, qu’on est peut-être même un terroriste en puissance et qu’on est finalement indésirable ». En reprenant cet argument que nous assènent tous les fondamentalistes, ce politicien ment. En conscience. Comme ces « idiots utiles », qui, en toutes circonstances, quand les extrémistes rouges ou bruns pilonnaient les principes et les institutions démocratiques, se plaçaient à leur côté en flairant dans les mesures d’auto-défense de la République un parfum nauséabond de fascisme. Et notre sensible « nez » politique de renifler aujourd’hui celui d’un « Vychisme » ranci et de dénoncer en tout partisan d’une loi d’interdiction l’ admirateur honteux de la milice pétainiste . Comme Robert Badinter, sans doute, qui appelle, il n’est pas le seul, au consensus républicain et à la fermeté au nom d’une fraternité de principe : «  La fraternité, c’est d’abord dans le visage de l’autre que je le découvre. Si vous vous adressez à un fantôme, comment voulez-vous avoir avec lui un rapport de fraternité ou de sociabilité? » En ces temps de fortes tensions sociales et politiques, Mamère a choisi le  chemin de la stigmatisation des défenseurs de la dignité des femmes et des violences qui leur sont faites au profit d’une tradition et d’un fondamentalisme religieux moyenâgeux. En application du sacro saint principe écologiste de la défense et de la préservation de la biodiversité costumière qui semble l’habiller des pieds à la tête, peut-être ! Comme une burqua. Verte…

Ce n’est pas la vérité qui est révolutionnaire, mais le mensonge!

 

 

 

 

 

Pendant vingt ans, les gouvernants grecs de droite et de gauche ont menti. Consciemment ! Avec ce cynisme  propre à ceux qui usent du mensonge et de la ruse pour conquérir et conserver le pouvoir. Un cynisme couvert par le silence de médias moutonniers au niveau d’informations indexé sur les attentes supposées de leurs « clients ». Et des «  clients » qui forment peuple, la tête dans le sable, ne voulant pas regarder en face l’amère réalité de leur pays. Un pays en défaut de paiement et qui, comme l’Espagne, le Portugal et la France a décidé, collectivement, de vivre au dessus de ses moyens. Une crise sans précédent qui n’est nullement cantonnée aux « pays du club Med » comme on nous le serine quotidiennement mais qui touche l’Europe entière. Car notre continent s’enferme dans le surendettement des Etats, qui atteint 88% du PIB en 2010 et dépassera 120% dans la décennie, contre 30% dans le monde émergent et 52% dans l’Etat fédéral américain. Ne parlons même pas  des engagements de retraite qui culminent à 440% du PIB !!! Un continent certes encore riche mais stagnant où le blocage de l’activité et le chômage permanent vont créer des tensions croissantes favorables aux démagogues et aux extrémistes. Pour écarter ces menaces, il est encore temps de tirer toutes les conséquences de la mondialisation et des nouveaux rapports de force entre grandes régions économiques. Et s’orienter résolument vers une plus grande intégration des politiques budgétaires et fiscales des Etats européens. En se dotant aussi d’un gouvernement économique doté de véritables compétences. Conditions minimales pour devenir un véritable pole de décision capable d’assumer la compétition et la coopération avec les Etats continents (Etats-Unis, Chine, Inde…) qui demain concourront pour le pilotage de l’économie-monde. Au risque de la décroissance, de la paupérisation et de graves difficultés politiques et sociales. Ce n’est pas  » la vérité qui est révolutionnaire », comme le constate honteusement Paulin dans le roman de H. Barbusse,  » Clarté  » ( formule que reprendra Gramsci et que plagieront sans vergogne Lénine et Trotsky ), mais le mensonge. Comme on peut le constater aujourd’hui en Grèce et peut être demain ailleurs…

Le syndrome de l’Elysée.

 

 

 

 

En 1965, presque personne n’a voulu se présenter à l’élection présidentielle. Ni Mendés France, ni Pinay. C’était il est vrai la première. Aujourd’hui, c’est plutôt la bousculade. A gauche, DSK hésite, Royal dit ne pas être candidate en l’état , Fabius encore moins , Valls piaffe d’impatience, Collomb pointe son nez, Martine avance masquée et Hollande s’est déclaré. Quant à Mélenchon, Joly et d’autres encore, ils font tout, ou semblant, pour en être.