Je fais pourtant l’effort intellectuel et moral pour contrarier ma répugnance naturelle pour ce genre de chasse à l’homme savamment orchestrée par Médiapart, mais les meutes soulevées à l’occasion sur les réseaux sociaux — surtout — souvent ignobles, me ramènent toujours à ce qui est à la source de ce journalisme d’investigation à savoir — n’ayons pas peur des mots — la délation ; son existence économique, commerciale et financière, elle, puisant son carburant, dans l’envie et la jouissance enfouies au coeur des hommes d’abattre ceux détenteurs d’un quelconque pouvoir — surtout politique — , au nom de la justice et de l’égalité.
La justice devrait-elle être aux ordres des journalistes? Salutaire coup de griffe de la plume d’Aliocha.
« La justice française machine à blanchir », titre François Bonnet co-fondateur de Mediapart, dans une tribune incendiaire du 28 mai 2015. L’objet de son courroux ? La relaxe prononcée par la justice au bénéfice de l’ancien ministre Eric Woerth dans l’affaire Bettencourt. On comprend la colère du directeur éditorial de Mediapart. Avec tout le mal que se donne cet organisme (peut-on encore parler de site de presse ?) pour faire sortir les affaires que des policiers corrompus et des juges à la botte voudraient enterrer. Et patatras, la justice sourde et aveugle aux idéaux du plus vertueux des chiens de garde de la démocratie que la presse ait jamais engendré, la justice donc embourbée dans ses compromissions et ses vices s’obstine à blanchir les affreux coupables que Mediapart lui apporte pourtant ficelés et déjà grillés médiatiquement. Tout à sa rancoeur, l’auteur saisit l’occasion pour dénoncer la justice manipulée dans l’affaire Kerviel (il en est sûr puisque l’avocat de la défense le dit depuis 2 ans à une de ses journalistes qui l’a maintes fois répété, c’est dire la force de la preuve), la justice à genoux dans le dossier EADS, la justice fasciste dans l’affaire de Clichy-sous-bois, la justice malade dans l’affaire Outreau, la justice folle dans Tarnac….Zola n’avait qu’une seule cause à défendre, François Bonnet en a trouvé six ! Et encore, sans chercher. C’est dire…
Mediapart a dévoilé jeudi 25 septembre que l’administration fiscale lui réclamait 4,2 millions d’euros pour ne pas s’être acquitté pendant cinq ans de la TVA qui lui était applicable.
La justice a ordonné jeudi 4 juillet au Point et à Mediapart de retirer de leurs sites Internet respectifs les retranscriptions des enregistrements pirates réalisés chez Liliane Bettencourt par son majordome, estimant que leur diffusion constituait une atteinte à la vie privée de la milliardaire. La réaction de Médiapart, qui » interdit » à tout citoyen ordinaire de commenter une décision de justice, fut-il élu ou, pire, ancien président de la République, a été à la hauteur de sa réputation. Selon ses responsables, il s’agit en effet d’un « acte de censure judiciaire », d’une décision « liberticide et ubuesque » digne de la « dictature de Pinochet » ou de la « fin de l’ère Ceaucescu » ? On imagine sans peine ce qu’il serait advenu à un Guaino, par exemple, s’il s’était permis ce genre de qualificatifs … Bref, si l’on comprend bien, les juges seraient illégitimes à fixer les limites de la liberté d’expression et celles de » l’atteinte à la vie privée » . De quoi nourrir les espoirs de reconversion professionnelle de tous les flics du monde. E. Pleynel et ses amis, en réagissant de la sorte, se sont pris les plumes dans le tapis. Que diraient-ils, si, le soulevant, ils y trouvaient un micro ?…