Manuel Valls fait des élections départementales celles de la seule lutte contre le FN. Si la menace est sérieuse, on peut néanmoins s’interroger sur le sens politique de sa stratégie. On aurait pu s’attendre, en effet, à ce que le premier ministre, sa majorité, le PS et ses alliés défendent la politique et les actions que le gouvernement met en oeuvre, sous l’autorité de François Hollande. À tort ou à raison, peu importe, sous le quinquennat, les élections intermédiaires valident ou pas la politique de l’exécutif. Il est donc clair que Manuel Valls, en déplaçant, l’axe de la campagne sur le seul terrain de l’affrontement « moral » avec le FN, fait l’amer constat que le combat idéologique et politique sur le bilan gouvernemental, depuis 2012, est perdu.
La décision du Gouvernement de Manuel Valls d’utiliser le 49.3 (ce qui n’est pas scandaleux, en soi!) pour faire passer la loi dite Macron au motif que sa gauche de la gauche, du PS au Front de Gauche en passant par les Verts, établit désormais que ses seuls marqueurs culturels, idéologiques et politiques se limitent au « Mariage pour Tous » et « Au refus du travail le Dimanche », même étendu de quelques jours à peine. Avec comme figures emblématiques, mesdames Taubira et Aubry.
C’est aussi le signe de la fin d’une longue période historique où la Gauche, disons traditionnelle et au sur-moi marxiste, jouissait d’une incontestable et lourde hégémonie culturelle au sein de la société civile. Une hégémonie au sens « Gramscien » (1) du terme qui lui a permis de conquérir nombre de pouvoirs, dont celui de l’État.
Comment faire semblant de l’ignorer, ce dernier sondage de l’IFOP pour le « JDD » de ce dimanche 15 février ? Le parti de madame Le Pen est crédité de 29% d’intentions de vote, et l’UMP et le PS, seraient, l’un et l’autre, devancés, lors des élections départementales des 22 et 29 mars. Et comment s’en étonner surtout à voir les rayons «politique» des grandes et petites librairies emplis de livres à son sujet, les médias écrits, audios ou télés saturés de commentaires et de polémiques sur sa dangerosité , et les partis dits de gouvernement fuir les graves questions qui préoccupent la France et les français en « lepénisant » la sécurité, l’intégration etc…
Deux raisons, au moins, justifient pourtant que l’on mette un terme à ce dispositif qui, dans les faits, n’est que l’organisation d’un clientélisme politique à grande échelle.
Commençons par la plus évidente : le coût exorbitant de sa distribution.
Il faut savoir , en effet, que la réserve d’ un – ou d’une – député , n’est pas une enveloppe financière qui lui serait attribuée, une cagnotte, mais un droit de tirage sur les budgets des différents départements ministériels qui permet à nos députés d’allouer des subventions à divers organismes, et ce en dehors de tout contrôle effectif. Imaginez le nombre et la longueur des circuits, l’énergie et les frais de fonctionnement de l’Etat, pour affecter, par exemple, 890 euros à la « création d’un point d’éclairage afin de sécuriser l’accès à une maison » construite au bout d’une rue de la commune de Ménévillers, 104 habitants. Une aberration administrative et financière d’autant plus coûteuse que l’immense majorité des « réserves » en question financent des opérations qui relèvent de la compétence des communes et des départements. Difficile donc de trouver mieux à supprimer dans la chasse aux dysfonctionnements de notre administration publique.
Mais c’est sur le « fond » de ces pratiques au caractère quasiment féodal que je voudrais attirer l’attention. Comme chacun le sait, ou plutôt, devrait le savoir, un parlementaire n’a pas de mandat impératif : il ne représente ni un territoire, ni les électeurs qui l’ont élu, mais la Nation ; et son travail consiste à élaborer et/ou voter des lois, et contrôler l’action du gouvernement. Or, distribuer, même indirectement, des subventions sur sa circonscription est évidemment contraire à ce vieux principe républicain, pourtant enseigné dans toutes les facultés de droit du pays.
Désolant, donc, que le premier secrétaire d’un parti qui prétend représenter le progrès, la transparence et « faire vivre la République », sous la pression évidente de ses élus, ait retiré de son texte la disparition de cette réserve parlementaire. Mais un geste politique cependant qui en dit long sur le courage et la capacité d’innovation du PS quand il s’agit de toucher au « statut » de ses élus. En cela, force est de constater qu’il ne se différencie guère d’une UMP, qui, sur cette question, en tout cas, ne pense pas autrement…
« Le front républicain » fait débat dans la presse locale (le Midi Libre du 9 février 2015) entre les principaux candidats aux élections départementales, sur Narbonne en tout cas. À l’exception, cependant, de J’aime Narbonne (PS et alliés, encartés ou pas) qui, par la voix de Nicolas Sainte- Cluque, déclare son intention de faire barrage, au second tour, au candidat du FN s’il était opposé à un candidat UMP ou Nouveau Narbonne, et du parti de madame le Pen qui, comme d’habitude, refusera d’apporter « ses » voix à l’UMPS. Du côté de la droite locale, les points de vue sont plus variés. Jean Paul César prône le « barrage » au FN, à titre personnel, quant à Didier Mouly, il explique que si c’est « un candidat responsable, on peut appeler à voter pour lui. Sinon, il faut laisser les électeurs choisir. »