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Trois notes d’humeur sur la « vie » narbonnaise – et d’ailleurs !

Samedi matin, entre Halles et rue du Pont des Marchand. Le ciel est encore gris de hauts nuages. Un léger vent marin les pousse vers l’intérieur des terres. Au-dessus de ma tête, des goélands tournoient en altitude. Ils crient, raillent – pleurent ? On dirait des vautours réclamant leur pitance. Et l’image de l’un de cette espèce, lors d’une de mes balades sur l’ancien chemin de halage bordant la Robine, à peu près au même endroit, fondant sur une bergeronnette pour la massacrer à coups de bec redoublés, féroces, s’impose brutalement à mon esprit. Plus tard, revenant sur mes pas, elle gisait là, au même endroit, le reste de ses entrailles exposées au soleil…
Chronique de Narbonne l’été. Lire « Le premier de la classe » de Benjamin Crémieux: une enfance narbonnaise…
Longtemps j’ai écouté, tous les samedis matins, sur France Culture, loin de Narbonne, la ville natale de son père et la mienne, Francis Crémieux et son émission le Monde contemporain, animée conjointement avec Jean de Beer. Deux talents, deux personnalités aux fortes convictions ; deux voix politiquement très opposées et cependant profondément respectueuses l’une de l’autre. Journaliste communiste écarté de l’antenne en novembre 1948 en raison de sa participation à une manifestation devant les studios de la Radiodiffusion française, Francis Crémieux n’est réintégré dans son poste de rédacteur en chef qu’en 1981. Jean de Beer, lui , était gaulliste et chrétien. Ancien secrétaire général du Pen Club français, il est l’auteur de plusieurs essais tel le Tombeau de Jean Giraudoux (1952), une étude sur Montherlant ou l’Homme encombré de Dieu (Grand prix de la critique 1963) et l’Aventure chrétienne, en 1981, sur les débuts du christianisme.
Tous deux ont disparu, mais j’ai encore présente à l’esprit, non la teneur de leurs échanges, bien évidemment, mais la vivacité de ton avec laquelle ils défendaient leurs arguments et convictions.

Chronique de Narbonne: Rue du Pont des Marchands (avec Pierre Reverdy)
Des êtres vaguesUne honte trop grande a relevé mon front. Je me suis débarrassé de ces encombrantes guenilles et j’attends.
Vous attendez aussi mais je ne sais plus quoi. Pourvu que quelque chose arrive. Tous les yeux s’allument aux fenêtres, toute la jalousie de nos rivaux recule au seuil des portes. Pourtant s’il n’allait rien venir.
À présent je passe entre les deux trottoirs ; je suis seul, avec le vent qui m’accompagne en se moquant de moi. Comment fuir ailleurs que dans la nuit.
Mais la table et la lampe sont là qui m’attendent et tout le reste est mort de rage sous la porte. Pierre Reverdy