Une soirée au Café de la Paix, à Gruissan…

   

   

C’est un café à l’ancienne en plein coeur du village. Son intérieur est celui d’un bateau. Sobre. Comme ceux qui naviguent au loin. Sa terrasse, à angle droit, s’étend sur les trottoirs de la place du maréchal Joffre. Elle ouvre sur la rue de la République, en face, et sur la Grande Rue, côté droit, qui mène, d’un trait, à l’église, située au pied de la tour Barberousse. Rue Espert, à une dizaine de mètres environ, on trouve son « concurrent » : le Joffre. Un condensé symbolique de la grande histoire…

Scène de la vie narbonnaise : un café chez E…

9h 30 chez E… Je m’installe dans un coin de la salle, face au comptoir, et commande un café – la spécialité de la maison ! Seul à ma table, l’autre déserte, j’occupe tout  ce petit espace avec un léger sentiment de béatitude – à 8h 30, j’étais dans le fauteuil d’un dentiste ! Arrive un couple de « retraités ». Ils s’installent à ma droite. Lui sur la banquette, elle sur une chaise. Les effluves agressifs d’un parfum bon marché cassent aussitôt les goûteux arômes des graines ici torréfiées, plombent son apaisante ambiance.

« Lui », manifestement taiseux, se tait. « Elle », indubitablement bavarde, commente un journal  : « Aujourd’hui en France » ! On dirait qu’elle parle dans un  vieux micro déréglé. Les aigus montent et descendent sur un rythme syncopé. Un véritable supplice !

« Ils ont joué à huis clos. Tu as vu ? Ça veut dire quoi… La femme qui a mis  le feu. Tu as vu ? Ça veut dire quoi… Le petit-fils d’Alain Delon. Tu as vu ça ? C’est  son fils… Il l’a eu à quel âge son fils Alain ? Tu as vu ça ?… La banque, elle bloque la carte…  èèèhhh ! Tu as vu ?… C’est ça qu’ils sont allés voir… èèèhhh !… J’aime pas rester assise. Ça ne m’intéresse pas… èèèhhh ! C’est calme ici… Tu as vu ça ? èèèhhh ! »  Lui  : « Oui, c’est calme… »

Je sors à cet instant précis. Quel ciel ! Quelle beauté ! Les amandiers sont certainement en fleurs…

Ce soir là, « l’art », de manière inattendue, était involontairement dans la rue…

 

@photo : michelsanto.

   

Chaque soir, à la même heure, des boutiquiers pressés du centre ville entassent leurs « encombrants » – cartons, cintres, boîtes, papiers… – sur des trottoirs devenus en partie  impraticables, jusqu’à ce que les  servants des « camions poubelles » de l’entreprise assurant ce service de déblaiement rendent enfin aux piétons leur pouvoir  d’en user sans obstacles.