Entretien accordé par Marcel Gauchet et publié dans l’édition « abonnés » de la Matinale du Monde, de ce jour. Version intégrale :
La victoire de François Fillon vous a-t-elle surpris ?
Oui. J’avais remarqué, comme tout le monde, que François Fillon s’était nettement imposé lors des débats télévisés entre les candidats de la primaire, mais je ne pensais pas que l’électorat de droite pouvait se montrer aussi stratège. Il est en général plus fixé dans ses choix. Or, là, il a procédé à grande vitesse et au dernier moment, en fonction de cette offre d’un troisième homme qu’il n’avait pas vraiment perçue, à un calcul de réduction des inconvénients des deux grands favoris : Sarkozy, trop clivant, Juppé, trop consensuel.
Ce matin, dans l’Indépendant, l’annonce de la candidature de la députée PS sortante aux législatives de 2017 – elle sera seule en liste à la primaire de son parti – Marie-Hélène Fabre, et, sur Radio Grand Sud FM, celle d’Alain Perea, le jeune Vice-Président PS du Grand Narbonne, qui veut être le : « précurseur du grand chambardement à venir au PS après mai 2017 ».
Curieux quand même ces députés de la majorité présidentielle qui dressent des bilans de leur mandature que pourrait présenter un maire, un président d’Agglomération, un responsable viticole, un vice-président de la Région, un inspecteur d’académie… ou un responsable d’une association de développement local. Que je sache, le seul bilan dont ils sont comptables devant leurs électeurs est celui de la majorité à laquelle ils appartiennent, des lois qu’ils ont votées ; et des résultats du gouvernement qu’ils soutiennent au regard des engagements et propositions défendus devant les électeurs qui les ont portés à l’Assemblée ; et au pouvoir. Un ou une députée n’a pas, en effet, de mandat impératif, il représente la « volonté nationale », la « Nation toute entière » et non celle d’un territoire déterminé. Une des raisons, entre autres, pour lesquelles n’est pas exigé, pour candidater à cette élection, de payer ses impôts dans une commune de la circonscription convoitée… Bref ! le qualificatif de« proximité », toujours revendiquéà la veille du renouvellement de leur mandat n’est en réalité qu’un moyen de sauver les apparences. Outre que plus personne ne peut plus ne pas être « normal », de « proximité », à « l’écoute », « réactif », « communicant », et que sais-je encore, pour se « situer dans la modernité » (sic), nos députés en usent surtout comme un leurre. En détournant le regard des électeurs vers des actions dont la réalisation ne dépend en aucun cas de leur pouvoir d’élu, ils tentent ainsid’échapper à leur jugement proprement politique : sur leur parti et leur majorité. Le seul qui compte ! J’écarte volontairement celui – de jugement – que chacun peut émettre sur la personne, sa personnalité, son caractère… son profil, et qui, parfois, se révèle plus déterminant que tout le reste. Lapolitique, et c’est heureux, est aussi une activité, une profession, où l’affectif et le sensible jouent un très grand rôle dans la représentation que l’on se fait de ses principaux acteurs.
Note: Je me permets de faire observer au rédacteur de l’article concernant madame Fabre dans l’Indépendant de ce jour, que cette élue ne l’est pas au « parlement » (avec un petit p), mais à l’Assemblée Nationale. Le Parlement, en France, est la réunion des deux Chambres:le Sénat et l’Assemblée Nationale.
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Reconnaissons au moins à J.C Cambadélis une grande lucidité. Il sait correctement analyser les rapports de puissance dans un champ politique : la qualité première de dirigeants du PS passés et formés, comme lui, à l’école « trotskiste » – tendance Lambert. Qu’encore aujourd’hui, le patron du PS considère, même après l’onde de choc provoquée par la publication d’un livre de confidences de François Hollande qui ressemble à une forme de suicide personnel – et donc collectif pour le PS et la Gauche – qu’il n’y a pas d’alternative à la candidature du président sortant, est, de mon point de vue, parfaitement fondée.
Trois députés de l’Hérault : Christian Assaf, Fanny Dombre-Coste et Frédéric Roig sont parmi les signataires d’un l’amendement quiinterdit aux personnes condamnées pour corruption, trafic d’influence ou des infractions fiscales de se présenter à une élection.