Le spectacle donné par les chefs de l’opposition politique au gouvernement, alors que le pays traverse une crise sanitaire et économique sans précédent dans l’histoire récente, est tout simplement, je pèse mes mots, affligeant. Affligeant car faire de sa gestion et de ses conséquences, un problème exclusivement franco-français est absurde et politiquement irresponsable.
Hier, ma ville était grise et mouillée. Il pleuvait ! Un incessant lamento couvrait tout l’espace. Les façades gorgées d’eau présentaient d’étranges figures ; de rares passants semblaient glisser sur des trottoirs rendus à l’état liquide, tandis que des corneilles disputaient aux pigeons un carré de verdure imbibé d’eau, pareil à une éponge. Le temps s’étirait mollement ; le jour semblait la nuit, et je n’avais nulle envie d’en briser la ligne, ne serait-ce qu’une heure durant.
Malgré les énormes quantités d’articles et d’ouvrages publiés sur ce sujet, je ne sais toujours pas si nous vivons dans une société individualiste ou une société massifiée. Si nous vivions dans la première, le confinement qui nous est imposé par les autorités sanitaires et politiques, ne devrait pas nous faire souffrir au delà, si je puis dire, de ce que nos capacités psychiques naturelles et notre état moral sont capables de supporter.
15h 15 ! Sur la ville, d’épais nuages bas poussés par un fort vent de mer, filent vers l’intérieur des terres. Par moments, des trouées de lumière donnent à voir un peu de ciel bleu. Le soleil s’y glisse et colore des façades aux volets tristes. Tout semble las et respire l’ennuie.
Dans son journal, Jules Renard note ceci : « Il y a des gens qui, toute leur vie, se contentent de dire : « Évidemment ! Parfaitement ! C’est horrible, admirable, extravagant, bien curieux. » Par eux-mêmes ils n’ont aucune valeur, mais ils sont d’un grand secours à autrui : ils lui servent de verbes auxiliaires. » Aujourd’hui, il ajouterait à sa liste ceux qui n’ayant rien dire devant toutes choses élevées, se fendent, inspirés, d’un laconique et profond : « C’est intéressant, super, super intéressant, génial, débile, cool, super cool, chouette … ». Il serait étonné, affligé, comme nous, par leur nombre et leur suffisance.